Les nouvelles technologies juridiques en France préparent une lente révolution du droit  

On en parle de plus en plus : un nombre croissant de start-ups françaises se lancent dans le domaine de l’automatisation juridique, souvent appelée par son nom anglais de “legal tech”. De quoi s’agit-il? La “legal tech”, c’est la mise au service du droit des nouvelles technologies digitales afin d’en démocratiser l’accès et d’en rendre la forme plus intuitive. On peut rapporter au nombre de trois les grandes tendances caractérisant le processus actuel d’automatisation juridique :

En premier lieu, la rédaction de contrat se prêtant particulièrement bien à une mise en forme conditionnelle et standardisée, il est désormais possible, à l’âge digital que nous connaissons, de la rendre presque automatique : quelques informations à compléter dans un questionnaire en ligne, et un contrat sur mesure est produit sur base d’un algorithme structurant l’information et adaptant le contrat à la situation définie. Des contrats très standardisés, comme le contrat de bail par exemple, sont idéalement adapté à ce type de technique d’optimisation.

Mais la génération de contrats est loin d’être le seul changement important provoqué par les nouvelles technologies dans le secteur juridique. Les technologies de l’information et de la communication permettent aux avocats et autres professionnels du droit de développer une présence en ligne auparavant presque inexistante. Des entreprises comme LegalUP ont amorcé ce que certains qualifient « d’ubérisation » des professions juridiques. Des entreprises comme Guacamol et DemanderJustice permettent d’effectuer des procédures juridiques autrefois complexes intégralement en ligne et en quelques clics.

Enfin l’usage du big data fait également son entrée sur la scène des métiers du droit, et est en voie d’affecter profondément et sur le long terme la façon dont on consomme des prestations juridiques. La recherche de textes de loi est transformée par Doctrine.fr, le conseil juridique est en voie d’être bouleversé par une start-up comme Lawcracy, qui emploient des algorithmes permettant de traquer des subtilités juridiques comme jamais auparavant.

Le paysage juridique pourrait sur le long terme être révolutionné par ces acteurs des nouvelles technologies. Les besoins en personnel juridique peu ou moyennement qualifié seront amenés à décroître au fil du temps, corrélativement à la nécessité pour les différentes professions juridiques de se concentrer sur un coeur de métier à plus forte valeur ajoutée.

Ces évolutions pourraient également impacter rétroactivement les études de droit elles-mêmes. En effet, le juriste du futur sera sans doute également codeur, développeur et publicitaire au même titre qu’avocat, conseiller juridique ou fiscaliste! Les universités devront s’adapter aux nouvelles réalités du marché de l’emploi, et l’on peut potentiellement s’attendre, à moyen terme, à un décalage entre l’offre et la demande sur ce marché lors d’une période de transition d’un modèle de vie juridique vers un autre.

 

Romain Keppenne, business analyst chez LeBonBail